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Les pertes sont colossales : "entre les morts, les blessés et les disparus, elles représentent 1067 hommes au 95e RI, et 1137 hommes au 85e RI", décompte Jean-Pierre André. Dans le régiment de Cosne-sur-Loire, tous les officiers supérieurs et les deux tiers des cadres manquent à l'appel. Sachant qu'un régiment est composé de 3300 hommes, les 95e et 85e RI ont donc perdu... presqu'un tiers de leurs effectifs !


Le journal des marches et opérations (JMO) de la 31e Brigade, bulletin militaire officiel qui enregistre tous les faits de l'unité, décrit la situation au 19 août au soir avec ces termes terribles :
















"Toute cette région (...) est une zone de mort."

1. Blâmont, 15 août 1914

 

 

Depuis le 8 août 1914, les deux régiments, incorporés dans le 8e Corps d'Armée et la 31e Brigade, ont passé la frontière des territoires annexés par l'Allemagne en 1871. Le 14 août, ils approchent le petit village de Blâmont (dans l'actuelle Meurthe-et-Moselle). Les Allemands y sont retranchés avec des mitrailleuses.


Jean-Pierre André raconte : "Tel qu'ils l'avaient promis à l'école militaire Saint-Cyr, les jeunes Saint-Cyriens du régiment sont montés au combat le sabre à la main, avec leurs gants blancs et casoar (ndlr : plumeau ornant le couvre-chef des élèves de Saint-Cyr). Ils ont chargé comme à l'époque napoléonienne !"


Après d'intenses combats, le village est pris, mais au prix fort. Selon Jean-Pierre André, les combats ont fait 300 victimes, en comptant blessés et disparus.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2) Sarrebourg, 19-20 août 1914

 

 

Le 18 août, le 95e RI entre dans une ville de Sarrebourg (dans l'actuelle Moselle) pratiquement inoccupée par les Allemands, qui reculent. Le 85e RI occupe Bühl, petit village adjacent. "Mais c'est un piège. L'armée ennemie, très supérieure en nombre, s'est positionnée sur les hauteurs de Réding, en périphérie ouest de la ville. A l'arrière des troupes impériales, des canons puissants et de meilleure portée que ceux des Français sont positionnés."

Le 19 août, le 85e RI donne l'assaut sur Réding mais se casse les dents sur la défense allemande. Un détachement du régiment à la gare de la commune est massacré. Le 20 août au matin, les combats reprennent et les Français sont progressivement submergés par l'ennemi. Jean-Pierre André nous raconte en audio :

 

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Blâmont, Sarrebourg, Mattexey :

trois combats effroyables


Quant au JMO du 85e régiment d'infanterie, il consacre quasiment quarante pages entières à un sinistre inventaire de ses hommes morts ou blessés au combat les 19 et 20 août 1914.





Cliquez sur l'image pour consulter

un extrait de l'inventaire du 85e RI.

(source : Mémoire des hommes, site du

ministère de la défense)








Et encore ne sont comptés que les morts "réellement enterrés" : "Il est de toute évidence que, parmi les disparus, il y a un nombre considérables de tués et de blessés restés aux mains de l'ennemi", indique le JMO à la fin de son inventaire.



3) Mattexey, 25 août 1914



Les jours suivants, les deux régiments se replient 70 kilomètres en arrière, en repassant par Blâmont. Les troupes sont exsangues, mais le 25 août, elles reçoivent l'ordre d'attaquer le village de Mattexey (dans l'actuelle Meurthe-et-Moselle), près de la rivière Mortagne. L'opération rentre dans le cadre de la bataille défensive de la trouée de Charmes, qui vise à empêcher les Allemands d'enfoncer le front français.


Jean-Pierre André raconte : "Mattexey est lourdement défendu par les Allemands et fortifié. Le 95e RI passe à l'attaque sous les mitrailleuses : c'est une hécatombe ! Le régiment se replie dans un bois où il essaie de se réorganiser." Un épisode incroyable survient alors. On demande à la compagnie de réserve, qui gardait le drapeau, d'attaquer. Le lieutenant porte-drapeau se retrouve en première ligne, sa bannière déployée :



"Il prend une balle, il met un genou à terre, il se redresse..."






Selon le décompte de Jean-Pierre André, les combats de Mattexey feront 23 tués, 261 blessés et 393 disparus au 95e RI, soit presque 700 hommes en moins dans un régiment déjà très diminué.


Il faudra attendre le 27 août pour que les 95e RI et 85e RI soient renforcés d'environ 1000 nouveaux soldats chacun. "Mais en nombre, les arrivées n'ont pas compensé les pertes".



"Ça a été l'horreur !"

Jean-Pierre André montre un médaillon d'appartenance à plusieurs régiments venus du Berry, dont le 95e RI. Il date de la Grande Guerre. Photo : JB Allemand

Sarrebourg, 18 août 1914. La photo est de mauvaise qualité, mais il s'agit d'un des rares clichés des combats du 95e RI de fin août 1914. Il a été pris par le capitaine Octave Lépineux. A l'arrière-plan, on peut voir une explosion et on distingue quatre corps apparents au premier plan. Source : Archives départementales du Cher

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